Extrait de la revue Point de Vue Initiatique
L’Homme, devant l’Univers, s’interroge.
De nombreux historiens affirment que la Franc-Maçonnerie a été créée le 24 juin 1717. Cette indication est à la fois inexacte et vraie.
Elle est vraie si l’on veut établir par-là qu’à cette date précise quatre Loges, pour la première fois, s’assemblèrent et que la forme et les règlements qu’elles se donnèrent à cette occasion s’étendirent ensuite sur le monde entier.
Mais elle est inexacte, à coup sûr, par une constatation liminaire car dire qu’à cette date quatre Loges maçonniques se réunirent implique nécessairement l’existence préalable de la Franc-Maçonnerie.
La date du 24 juin 1717 n’est donc pas celle d’une création essentielle, elle est celle d’un aménagement fédératif.
La Franc-Maçonnerie a une histoire d’une plus considérable antiquité et ce vieux passé maçonnique a, de tous temps, passionné les érudits. Comme il soulève bien des problèmes, il a permis l’éclosion de nombreuses hypothèses.
Pour bien comprendre l’action soit d’un individu, soit d’une institution cohérente, il semble nécessaire de se pencher d’abord sur les éléments nutritifs de l’espace et du temps qui les ont constitués et animés le plus directement.
Cette méthode paraît être la seule qui conduise à la découverte, dans les œuvres individuelles ou collectives, de la marque puissante des contingences historiques, sans pour autant qu’elle amène à minimiser le rôle du libre arbitre de ceux des hommes qui travaillent à engranger en eux les expériences pour mieux pouvoir s’accomplir en vertus.
Cette méthode, au surplus, illumine plus que toute autre, par-delà les lieux et les âges, les croyances et les doctrines, les races et les climats, l’unité, la continuité du principe constructif de la vie universelle, et donc les thèmes d’une pensée spécifiquement humaine.
En effet, plus l’on progresse dans la connaissance du passé, plus l’on découvre les points d’insertion d’où les nouvelles doctrines, parussent-elles typiquement originales ou révolutionnaires, découlent tout bonnement de certaines qui les ont précédées.
Si donc, pour reprendre une expression fameuse de Renan, il y a des miracles » en histoire, entendons qu’elle comporte des moments surprenants qui forcent l’admiration et non pas des commencements absolus, phénomènes irrationnels et sans cause perceptible. De commencement absolu, il n’y en eut qu’un, mais avant l’Histoire et ce n’est pas ici notre propos.
Penchons-nous seulement sur l’homme, ce complexe d’âme sensitive et de matière périssable, cherchant douloureusement son équilibre entre la pulsation de ses désirs et les commandements ordonnés de l’esprit, non pas sur l’individu contingent, mais sur l’être humain, en général, tel qu’il nous appariait, orienté, depuis l’aube des temps, sur la route royale de la connaissance, cherchant à s’alléger de tout ce qui arrête son élan vers le concept de l’Universel.
Pour qui veut observer, en effet, ce qui domine la diversité des civilisations, c’est cette identité foncière dans l’essence et le fonctionnement de l’esprit, cette inextinguible soif de comprendre que porte en lui l’humain, » ce sel de la Terre « .
Mais il y a plus, l’homme n’est pas seulement un animal pensant, il est aussi social et, par-là encore, vise à l’universel. Il n’a cessé, depuis les temps reculés de parcourir les distances les plus difficilement
Que pourrions-nous donc trouver de surprenant dans la constatation de la continuité, à travers les pays et les siècles, des thèmes de pensée spécifiques à l’homme, méditatif et propagandiste à la fois ?
Le nombre comme racine de ce qui Est. Rôle de Pythagore
Sur ce terrain mouvementé de l’Histoire, voulez-vous que nous allions reconnaître quelques jalons propres à faire découvrir la voie de la Tradition maçonnique ?
C’est en Egypte que nous irons d’abord.
Les traductions de hiéroglyphes qui remontent jusqu’à la quatrième dynastie nous donnent l’assurance que les prêtres de ce pays invoquaient un Dieu unique, sans aucun caractère mythologique et anthropomorphique, principe de toute morale et de tout bien, ordonnateur de toute chose. L’une d’elles le décrit en ces termes, remarquables à plusieurs titres » il est celui qui n’a pas de nom, l’Eternel, celui qui est caché et dont on ne connaît pas la forme, trop mystérieux pour que sa gloire puisse être révélée, trop grand pour être scruté, trop puissant pour être connu, celui qui s’est produit lui-même, qui leva la tête hors du chaos et qui a créé avec ce qui est sorti de sa bouche. »
Si les papyrus révèlent ceci, mieux encore s’exprimaient certainement les traditions orales, plus librement transmises de maîtres à disciples dans un culte secret.
Or, disaient ces maîtres, c’est de cette notion d’unité absolue, c’est-à-dire de l’Univers qui contient tout, que découle la notion du nombre, et donc celle de toutes les sciences. En effet, chaque aspect particulier et analytique de l’Univers n’est qu’une division de ce dernier, et par conséquent un nombre.
De même, les phénomènes naturels sont tous soumis à des lois, lesquelles se ramènent à des coefficients, c’est-à-dire à des nombres.
Dès lors, le nombre est à la racine de l’Univers manifesté.
Ces propositions, de tonalité si moderne, vous les trouverez cependant dans les antiques livres sacrés de l’Inde et de la Chine, d’Egypte et de Chaldée, dépositaires des plus anciens enseignements de l’esprit et pour l’usage secret de ceux qui y avaient accès.
Tel est l’essentiel de ce que Pythagore ramena d’Orient en Hellade, avec la foi en l’immortalité de l’âme, la valeur magique du Verbe, de la forme, du signe, du symbole, du rite, du rythme, de la sensation, la foi aussi en l’utilité des régimes théocratiques, aussi éloignés du gouvernement d’un seul que de celui de la foule aveugle.
Chacun sait que ce qu’enseignait cet incomparable génie, plus de cinq siècles avant notre ère, requérait des années d’étude pour ses adeptes.
Sa Cosmogonie
Il disait en substance :
La naissance du Cosmos, formé de matière et d’énergie, n’est pas une création tirée du néant, mais une transformation partielle du chaos : Univers-Espace-Temps illimité, en une manifestation ordonnée, pour nous concevable en » acte » dans notre Espace-Temps limité.
Or, un acte est un rapport des forces, c’est-à-dire un point commun, une limite, un nombre, et sans lui rien ne serait.
Plus encore, rien ne peut être si l’acte, quoique étant, n’est pas lui-même conduit selon une loi et en vue d’une harmonie.
Sans doute convient-il d’illustrer d’un exemple concret à échelle réduite cette théorie dont certains peuvent craindre l’abstraction apparente : Supposez alors le rapport entre un oeil et une lumière ; il faut que ce rapport soit harmonieux pour subsister; si la lumière est trop grande, ou la vue trop faible, la sensation en sera anéantie.
Si, dès la manifestation cosmique, l’acte est nécessairement nombre et harmonie ; le nombre est la mesure, la limite des contraires, principes nécessaires de toute existence et de toute pensée.
De ces prémices découlent logiquement toute la doctrine religieuse, toute la philosophie, toute la science, toute la morale, toute la politique et toute la règle artistique pythagoricienne, autant dire, ainsi que nous espérons le montrer lus loin tous les fondements de notre civilisation occidentale.
Sa Philosophie
C’est pourquoi, pour Pythagore et ses disciples, le nombre était tenu pour ce qu’il y a de plus sage et l’harmonie pour ce qu’il y a de plus beau.
Pour eux, la vie de l’âme ou la vie du monde, la physique, l’astronomie, la géométrie, la médecine, la sociologie, la morale, la danse, les exercices du gymnase, tout aussi bien que les sons aigus de la flûte du berger devant la mer Tyrrhénienne, ou la phénoménale symphonie qu’ils percevaient du roulement des astres dans les profondeurs immenses du ciel, tout procédait de la même harmonie nécessaire.
Ils définissaient la réalité : l’apparence du nombre et par cette « affirmation, ils ont propagé dans le monde les bases d’un idéalisme qui n’a jamais cessé depuis sa carrière triomphante, de Platon à Cicéron, de Posidonius d’Apamée à Saint-Augustin, des Esséniens aux Gnostiques et aux Sextiens, de Dante à Cardan, de Bruno à Spinoza, de Leibniz à Kant, de Schelling à Bergson, Cantor, Einstein, Schrödinger et de Broglie ».
Si donc tout dans la nature, et la nature elle-même, obéit à un ordre, à une loi, dont le nombre est la forme et la mesure, cette loi constante, qui se manifeste en tout être et dans tout phénomène naturel, qui en est la condition nécessaire et universelle, en est aussi, selon Pythagore, la cause, le principe, la substance, l’essence.
Or, tout nombre étant engendré par l’Un, père du nombre, l’Un est le principe universel.
La science des nombres est donc la science des choses et la philosophie se ramène à une mathématique qui, seule, donne la méthode, la forme et la solution de la science.
Bien plus tard, Malebranche remarquera que » la notion de nombre constitue la mesure commune de toutes les autres choses que nous pouvons connaître « . C’était le langage même de Pythagore.
Disons que la langue des nombres est la langue des idées, des pensées, de la connaissance, par opposition à la langue des sentiments qui ne peut s’exprimer que par des mots.
Sans doute est-ce pour cela que Pythagore affirmait, dit-on, que le nombre ne ment pas et qu’il est, vérité.
Certes, il est, par lui-même, une seule et même chose, susceptible à la fois d’une signification concrète de quantité ou de valeur et d’une signification abstraite de qualité ou d’idée.
On comprend, dès lors, que, dans l’enseignement initiatique de tous les temps, le nombre ait été choisi comme le symbole le plus précieux, en raison de sa précision, de sa simplicité, de son universalité.
S’il parait pouvoir se plier à des interprétations différentes, toutes ne peuvent que se rattacher à une même idée fondamentale, parce que le nombre a, lui-même, une valeur propre qu’il communique à l’objet.
Le nombre, essence même de toute chose, est la forme exprimée mathématiquement: Voilà le Credo de Pythagore.
Mais le philosophe grec ne s’était pas contenté d’étudier les nombres en eux-mêmes, « in abstracto « , il avait voulu tout vérifier et tout mesurer, il avait porté partout le calcul mathématique et voilà que des rapports inconnus jusqu’alors, mais confirmatifs de sa foi, lui étaient aussitôt apparus de tous côtés : En musique, entre la sensation produite par la note et le nombre qui représente la longueur de la corde sonore; en géométrie, entre la sensation qui résulte de la forme visible et le nombre qui traduit cette forme.
De pareilles constatations lui confirmaient que la matière n’était rien sans le nombre et l’harmonie, car l’être n’étant qu’un rapport, et donc un nombre, et cet être étant composé d’éléments dissemblables rapprochés par un principe qui leur donne vie et action, ce principe nécessaire d’unification ne pouvait être que la loi absolue de l’ordre harmonieux, dans le monde physique comme dans le monde moral.
C’est ainsi que, 19 siècles avant Copernic, il avait calculé, sur la base de la décade résentative de l’ordre parfait, que la terre, sphère en mouvement.
Connaissant les lois de l’harmonie musicale et postulant que l’astronomie n’était qu’une musique céleste, il disait qu’il suffisait de connaître les lois de l’octave pour connaître, par-là même, et les distances et les vitesses des astres.
Ainsi l’harmonie des sphères n’était pas pour Pythagore une simple métaphore.
C’est donc à cet homme que le monde de l’Occident doit, par la conséquence logique de tout ce qui peut être créé à partir du nombre, l’enseignement des proportions mathématiques et de la propriété du triangle rectangle.
Son Enseignement
Nous allons dire par suite de quelles circonstances les disciples de Pythagore formaient une Société fermée et fortement constituée, une communauté liée par le serment du secret, une confraternité initiatique ou » tout n’était pas communiqué à tous « , un Ordre hiérarchisé, spéculatif et militant, essentiellement fondé sur l’existence d’une Puissance suprême et unique, créatrice et ordonnatrice de l’Univers, sur l’immortalité de l’âme et le jugement dernier, l’amour des créatures, le renoncement, l’examen de conscience, la punition des fautes et des péchés, ces violations de la loi d’harmonie vitale.
Cet Ordre connut un triomphe qui, pour son malheur, s’étendit hors du domaine ésotérique. Dès lors une sorte de terreur jalouse, génératrice de haine, s’empara de certains, qui ameutèrent, contre lui, la foule aveugle. Il fut démembré par la violence et ses adeptes pourchassés se dispersèrent.
Cette diaspora eut pour effet de faire refleurir en des lieux différents des rameaux replantés du vieil arbre pythagoricien; rameaux de qualités inégales, selon le degré d’initiation reçu par l’adepte émigré; rameaux, encore, que, dans leur isolement, le secret de l’Ordre détruit ne protégeait plus de l’indiscrétion profane.
On peut ainsi imaginer comment se diffusa la doctrine pythagoricienne, comment elle put nourrir les « idées » de Platon tout autant que les formules aristotéliciennes, comment aussi l’accueil enthousiaste que lui fit l’esprit étrusque pour la placer à la base même des futures institutions romaines, harmonieusement assises sur la triple notion de l’aristocratie, du pontificat et de l’ordre juridique.
Or, tout autant que l’élite grecque ou le patriciat romain de la République et de l’Empire, Alexandrie, capitale intellectuelle et scientifique, s’ouvrit aux enseignements pythagoriciens et les répandit en Judée, notamment dans les sociétés de thérapeutes et plus encore dans la confraternité secrète des Esséniens.
Ainsi, au centre comme au sud de la Méditerranée, les métropoles du monde antique, pendant cinq siècles avant notre ère, avaient connu et pratiqué les enseignements de Pythagore si appropriés à leurs besoins spirituels.
Dès lors, par ces auteurs romains, grecs, alexandrins et juifs, et plus tard par les livres de Saint-Augustin, par les sectateurs de la Cabbale et de la Gnose, l’essentiel des doctrines métaphysiques et mathématiques de Pythagore fut transmis de siècle en siècle dans tout l’Empire Romain, à l’Occident comme à l’Orient.
L’organisation des Maçons Constructeurs basée sur la confraternité pythagoricienne
Mais peut-être plus encore que par ces théoriciens, les doctrines pythagoriciennes de mathématique appliquée furent conservées et transmises, sous la forme de secrets de famille, par les corporations d’artisans constructeurs.
Nous en trouvons la confirmation dans plusieurs textes légaux de l’Antiquité.
Nous citerons, à titre d’exemple, un texte du Code de Théodose, qui exempte les architectes de toute charge personnelle, « afin qu’ils puissent plus aisément apprendre à leurs enfants et disciples la pratique de leur art, nous assistons à un prodigieux essor de l’architecture religieuse, et ce fut l’occasion de vastes réunions d’Ateliers ou Loges de Maçons.
« Les connaissances architecturales de ces derniers furent augmentées par les recherches et le savoir des moines bénédictins, lesquels non seulement conservèrent ou retrouvèrent les textes mathématiques de l’antiquité grecque ou alexandrine, ainsi que le traité d’architecture de Vitruve, mais encore nous transmirent, d’une part la mystique pythagoricienne des nombres, d’autre part la géométrie des solides platoniciens et de leurs corrélations harmoniques.
Ainsi, les Loges de maçons et tailleurs de pierre reprirent, avec le chemin de leurs chantiers répandus sur l’Europe comme sur tout le pourtour de la Méditerranée, leurs antiques traditions dans un savoir plus vaste. »
Le symbolisme initiatique des outils de la profession d’architecte et de maçon acquiert dès lors une clarté nouvelle due aux secrets géométriques transmis par les Maîtres du savoir.
Au-delà de son attribution d’objet utilitaire, l’outil se transmue en outre en symbole : dès lors, tel instrument de tracés angulaires, l’équerre, pourra évoquer le fini, le limité, le connu, le concret, le contingent, le transitoire, la terre, tandis que tel autre, le compas, servant aux tracés circulaires pourra, au contraire, évoquer l’infini, l’illimité, l’inconnu, l’abstrait, l’éternel, l’espace, le ciel.
Mais, et c’est une observation riche de sens, nos Maçons philosophes les tiennent intimement unis, car ils savent bien que les contraires ne sont qu’un aspect momentané de l’Unité suprême, un moyen de ne la diviser un instant que pour la conjoindre aussitôt et, de ce contact reconstitutif, faire sourdre l’énergie créatrice.
Cette Unité suprême, cette conjonction nécessaire de ses aspects contraires, voilà ce que leur symbolique n’a jamais oublié. Aujourd’hui comme jadis, la Loge s’illumine de cette triple représentation essentielle; autrement, toute sa filiation avec la tradition la plus antique des sages de l’humanité en serait détruite.
Le fait est que la pensée pythagoricienne n’a jamais cessé de poursuivre sa voie pendant tout le cours du Moyen Age, de la Renaissance et des Temps modernes.
Et lorsque Hegel dit : « Tout est relatif, tout est devenir, changements, mouvement, tout est rapport… » ne croit-on pas entendre tout à la fois la voix même de Pythagore et celle de la science moderne et mieux comprendre la boutade de Bertrand Russel :
» Le plus remarquable du caractère de la science moderne est son retour vers la pensée de Pythagore. »
Certes, la science moderne, » en dégageant une image du monde physique ou la structure seule compte, en établissant une philosophie de la forme, du rythme et de la périodicité, a de nouveau mis en lumière que le nombre, et non la substance, est la seule réalité.
Il reste peu de chose de l’ancien substratum matériel du monde, sinon la forme et le rythme. »
Mais fermons cette parenthèse et revenons à nos maçons, héritiers laborieux du savoir pythagoricien et, à travers lui, de la science du sacerdoce égyptien, sinon même d’une science plus ancienne et que, pour ma part, je dirais volontiers atlantidienne; mais ceci serait une autre histoire…
L’art de construire et sa projection spirituelle
Mais pourquoi, me dira-t-on, parmi tant de corps de métiers, sont-ce les maçons qui, à votre opinion, auraient été le prestigieux véhicule de la tradition spirituelle de l’humanité?
L’explication en est bien simple.
Qui veut pratiquer l’art de construire doit connaître et respecter les lois régissant l’équilibre et l’harmonie, hors desquelles rien de durable ne saurait être érigé.
Ainsi, l’architecture, déjà fille des mathématiques, de la cosmogonie et de la géométrie, pour que les bâtisseurs, se soient toujours et bien naturellement sentis les disciples de la puissance ordonnatrice de l’énergie vitale des Mondes.
On devine aisément aussi les raisons pour lesquelles, en un temps où la transmission du savoir était essentiellement verbale, les constructeurs ont usé d’une rigueur éclairée dans leur recrutement, d’une sage lenteur dans l’apprentissage de leurs disciples, d’une sévérité nécessaire dans la démonstration de leur perfectionnement dans la pratique effective du métier et de l’art si utiles qu’ils exerçaient.
Autant de causes encore par lesquelles, constamment, les groupements de constructeurs ont ajouté à leurs préoccupations techniques la pratique d’un ésotérisme fructueux, et l’établissement de règles disciplinaires et rituelles au soutien de leur solidaire fraternité.
Constructeurs d’édifices civils, religieux ou militaires, dont certains ont conquis, à travers les siècles, une impérissable renommée, les Maçons, indispensables soutiens de la vie sociale, ont dignement démontré, dans les temps les plus reculés, l’honorable noblesse de leur travail émancipateur et respecté.
Les Maçons Constructeurs
Si réelle est cette constatation qu’elle est confirmée par le courant permanent d’estime, et fréquent de sympathie, qui attira vers ces maîtres d’œuvres bien des princes du pouvoir ou de l’esprit. Ce n’était pas seulement relations de clientèle dans le domaine professionnel, mais, en général et davantage encore, adhésion spirituelle à cette vaste et libre culture, si singulièrement attachante que, depuis la plus haute antiquité, les plus grands s’honoraient non seulement de protéger le métier par privilèges et franchises, mais encore d’être admis, comme membres acceptés, dans sa fraternité.
Par-là, la Confrérie des Francs-Maçons consolida la position éminente qu’elle occupait, et ses équipes savantes et habiles, partout recherchées dans le monde civilisé, furent appelées à l’exercice de leurs pratiques et de leur art en de nombreux pays, accroissant ainsi, avec sa notoriété, ses connaissances comparatives sur les mœurs et les coutumes des peuples.
Spécialement, il n’est pas exagéré de dire qu’au Moyen Age, et pendant deux cents ans, les Francs-Maçons ont été les hommes les plus capables de ce temps. Ils possédaient ensemble une somme de connaissances telle que nul, si haut placé qu’il fut, ne pouvait en avoir d’égale. C’est chez ces Francs-Maçons-là que la Confrérie moderne des Maçons libres et acceptés trouve sa plus précise origine. Ils conçurent, construisirent et entretinrent, dans l’Europe entière et le Proche-Orient, des milliers de cathédrales, chapelles, monastères, forteresses, aqueducs, châteaux, palais, etc.
Le Temple
Il convient de signaler particulièrement, à ce propos, les relations étroites et prolongées qui, notamment, existèrent entre les Francs-Maçons et les Chevaliers de l’Ordre du Temple à partir du XII° siècle.
Dévoués à la sécurité des pèlerins et à la défense du Saint Sépulcre, les Templiers, guerroyant plus que tous autres, eurent d’abord besoin d’ériger en Terre Sainte de multiples châteaux forts. De nombreux ouvriers maçons, groupés pour la plupart dans l »‘Ordre du Saint Devoir de Dieu des honnestes compagnons « , les y construisirent. Elargissant ensuite leurs activités au-delà de la Palestine, les Chevaliers du Temple firent élever bientôt, dans tous les pays d’Europe, une infinité d’établissements immobiliers. Plus de dix mille manoirs, outre les ouvrages militaires, portaient dans toute la chrétienté les couleurs de cet Ordre très puissant et prospère, jusqu’à ce que, au début du XIV° siècle, sous la pression du roi de France Philippe le bel, le pape Clément V le fit tragiquement conduire à sa perte par une procédure inquisitoriale approuvée par le Concile de Vienne.
Il y a, dans le rappel de l’importance considérable des biens fonciers de l’Ordre Souverain du Temple et, consécutivement, des rapports fréquents et nécessaires ayant existé pendant deux siècles entre les Chevaliers et les Francs-Maçons qui avaient construit, entretenu et réparé ces édifices, une circonstance que l’historien ne saurait négliger.
A défaut de documents explicites, elle est de nature à faire humainement admettre que les Chevaliers, alors pourchassés et ruinés, aient pu recevoir.
Les maçons acceptés
De tout cela concluons qu’il y a ainsi grande probabilité qu’au début du XlV° siècle d’anciens Chevaliers Templiers soient devenus Maçons, s’ils ne l’étaient déjà de longue date, à titre « d’acceptés « .
Il est curieux, en tout cas, de constater que c’est justement aux environs de ce milieu du XIV, siècle que, pour la première fois vraisemblablement, une Loge de Francs-Maçons fut, en Angleterre, non plus dissoute et dispersée selon l’usage, après que l’édifice à propos duquel elle avait été ouverte fut terminé, mais, au contraire, maintenue en activité et donc conservée pour elle-même.
Comment et pourquoi pareil fait se justifiait-il ?
La Loge
Les Francs-Maçons opératifs, lorsqu’ils étaient appelés à élever un de ces bâtiments qui font encore l’admiration des peuples, commençaient par construire, attenant au futur chantier, un petit édifice, la Loge.
Là, dans le travail, l’ordre et la fraternité, s’accomplissaient tous les travaux de la pensée, se conjoignaient tous les élans indispensables à la qualité équilibrée de l’œuvre. C’était le cœur et le cerveau de l’entreprise, le centre matériel et spirituel d’union et de cohésion des Maçons, non seulement avec leur édifice, mais encore entre eux, et surtout avec les lois de l’Architecture Universelle.
Si donc la Loge était la condition nécessaire à l’harmonie permanente, du commencement comme de la poursuite des travaux par des équipes est souvent renouvelées au cours de générations successives et composées d’artisans jouissant d’une grande liberté d’inspiration individuelle, c’est qu’elle était par elle-même une source incomparable de valeur.
La Loge des Francs-Maçons présentait donc, on le voit, un intérêt propre et indépendant de la nature de l’édifice qui avait été l’occasion de son établissement. Elle permettait à un certain nombre d’hommes qualifiés, Maçons opératifs ou Maçons acceptés, d’y trouver, dans l’antique discipline du métier, une fraternité, des enseignements, un rituel, des symboles, une philosophie, qui n’existaient nulle part ailleurs, c’est-à-dire une voie initiatique originale, propre à leur offrir les moyens d’acquérir, par un travail soutenu, les données harmoniques sans lesquelles il n’est pas de construction matérielle ou spirituelle, intérieure ou extérieure, durable, quel que soit le chantier où elles doivent s’élever.
Ces Loges permanentes, qu’elles fussent composées de Maçons opératifs ou spéculatifs, travaillant ensemble ou séparément fondaient la légitimité de leur existence civile dans la Charte royale qu’au Xe siècle, à York, l’Ordre, selon leur affirmation, s’était vu octroyer par le prince Edwin, fils d’Athelstan, et dont elles rappelaient la précieuse possession, avec l’exposé de leurs buts, lois et règles, dans un vénérable document dit » Manuscrit Royal « , dont les copies, nommées « Anciennes Obligations « , forment les assises fondamentales des Constitutions des Grandes Loges modernes.
Un exemplaire écrit de ces » Anciennes Obligations » était conservé, dans la salle de la Loge où les Maçons se rassemblaient, tant à titre de garantie légale de leur droit de se réunir que comme un instrument de référence constante à leurs statuts et devoirs multiséculaires, pieusement conservés.
Son Enseignement
C’est, en effet, la pratique même de leur métier, si riche d’enseignements de tous ordres, qui révéla aux Francs-Maçons l’inestimable contenu de leur devoir primordial : le Travail.
La Vie, pour sa pérennité, exige, nul ne saurait le contester, un emploi de l’homme par lui-même, en vue de faire ou de produire les choses qui lui sont indispensables à cette fin et que la nature s’est gardée de lui donner toutes prêtes, le sauvant ainsi de l’oisiveté, le plus dégradant des fléaux. Dans un monde qui s’offre à lui en exemple, comme un Temple conçu et construit, le Travail est la source intarissable de l’épanouissement des plus nobles valeurs de l’homme et la voie de sa réalisation par sa participation à un châtiment pour la chute de l’homme dans le péché, et considérait la possession d’une savante culture comme un germe d’hérésie, une tentation du démon.
Le secret de la Confrérie celui par lequel, vivante et saine, elle a survécu, grandissante, aux périodes révolues de l’Histoire, est pourtant, sans nul doute, d’avoir tenu le tablier de cuir de ses adeptes, insigne du travail émancipateur, comme une distinction plus ancienne et plus honorable que toutes celles établies par l’invention de l’homme.
Une pareille et si haute doctrine, produit concret de l’expérience vécue par chaque Franc-Maçon, quel que soit le lieu ou le temps de son activité, ne pouvait subir l’atteinte des déchirements religieux qui se produisirent sur un plan théologique qui lui a toujours été spécifiquement étranger.
Sa méthode
Depuis les temps les plus anciens, la Maîtrise, dans l’Art Royal de la Franc-Maçonnerie, avait été acquise par des hommes appartenant à bien des nations, fraternellement liés cependant par une communauté de savoirs, de pratiques et de disciplines. La Confrérie était une grande famille de travailleurs jugés dignes de participer à ses œuvres pour l’exclusive raison de leur mérite reconnu. Toute autre considération sans rapport avec le travail, qu’elle fût issue d’un particularisme local, d’un sectarisme spirituel ou de préjugés raciaux, ne pouvait trouver place en son sein.
Telle est la caractéristique incomparable de la Franc-Maçonnerie. C’est par-là qu’elle se distingue le plus radicalement de toutes les fraternités qui sont nées de ce bouillonnement occultiste, mystique ou humaniste dont les XV°, XVI° et XVII° siècles ont été animés.
Gutenberg et Fust purent donc imprimer leurs premières Bibles, des chrétiens s’affranchir du monopole des prêtres pour aller directement à Dieu, à travers elles et par leur seul intermédiaire, la Réforme protestante s’écrire et s’établir, la Renaissance fleurir, l’humanisme se répandre, les révolutions et restaurations se succéder, sans que l’esprit traditionnel de tolérance et d’indépendance de la Franc-Maçonnerie ait pu en être diminué d’aucune manière.
Tout au contraire, les Francs-Maçons n’eurent que trop d’occasions de le manifester et d’exercer, en outre, leurs sentiments de charité hospitalière au bénéfice de tous les persécutés, dans ces périodes agitées et tragiques. Aussi furent-ils les plus ardents propagateurs de cette harmonie pacificatrice, très propice à la gloire fructueuse du Travail, qui finit par triompher en Angleterre à la fin du XVII° siècle et trouva sa synthèse légale dans l’Acte de Tolérance de Guillaume d’Orange, Roi d’Angleterre et Franc-Maçon accepté.
C’est même pour créer entre les Ateliers maçonniques un lien plus étroit, un véritable centre d’union, qu’un petit nombre de Loges créa, à Londres, au solstice de 1717, une véritable fédération, la première Grande Loge permanente. Dès lors, les adhésions affluent, les Loges éparses s’agrègent, l’organisation se poursuit.
Sa Philosophie
La Maçonnerie n’aspirait qu’au bonheur de devenir » le moyen de rapprocher, par une véritable amitié, des personnes qui, sans elle, seraient restées perpétuellement éloignées « .
La vieille et pourtant toujours nouvelle et exaltante philosophie des Francs-Maçons leur permettait une foi solide dans cette espérance de communion fraternelle générale, déjà réalisée, depuis des siècles, par elle dans le domaine du travail opératif.
Il ne s’agissait, en réalité, de rien d’autre que de continuer à édifier et construire dans l’équilibre dynamique de la règle et de l’Amour, mais non plus des édifices matériels. Le Temple à élever devenait aussi vaste que la Terre, il était celui de la Fraternité et devait s’intégrer harmonieusement dans l’Ordre universel. Nous savons pourquoi les Loges conservaient, sur ce plan, toutes leurs vertus exhaustives. Nous ne sommes donc en rien surpris par l’engouement grâce auquel, en peu d’années, les élites de l’Ancien comme du Nouveau Monde vinrent s’agréger en nombre à la Franc-Maçonnerie.
Le Temple à édifier d’abord était et demeure en chaque homme de bonne volonté, animal certes, mais doué de raison, portant en lui la matière et l’esprit, le contingent et le permanent, le connu et l’inconnu, oscillant entre les deux pôles de ses forces motrices et tendues, cependant, vers le sublime dépassement du perceptible et de Inexprimable.
Sa fréquentation conduit chaque Franc-Maçon non point à refaçonner son être en le coulant passivement dans un moule idéal que des maîtres attentionnés auraient préparé pour son salut, non point à s’unifier dans l’identique, mais à travailler activement, selon les règles de l’Art, à rendre cubique sa propre pierre, afin de lui trouver place honorable parmi celles de grains différents que chacun de ses semblables aura dégrossie et polie de son côté pour l’unir à la sienne dans un scellement fraternel.
Ainsi, par son travail initiatique, le Franc-Maçon ne se contente pas de vivre, il œuvre à l’organisation équilibrée de la vie.
Tolérance
Une telle attitude est le contraire même de la facilité. Elle implique en toute circonstance une totale liberté de choix, une opinion personnelle sur chaque être et chaque chose.
Le moyen de réussir une œuvre pareille est, au premier chef, la pratique de la tolérance, elle-même base indispensable de toute véritable liberté. En effet, tout homme qui » apporte à l’observation, à l’étude, à la critique, un état de préjugé ne saurait être libre « . S’il veut le devenir, non seulement il doit » exclure de son jugement tout préjugé conscient « , mais encore « rechercher en lui, les préjugés inconscients, afin de les exclure dès qu’il les aura reconnus « , certain, au demeurant, de n’arriver jamais à les détecter tous, mais de se rapprocher du moins, autant qu’il est possible, de la précieuse et indomptable vérité.
L’homme qui agit de la sorte démontre sa connaissance de ses semblables en leurs complexités, et, les aimant et respectant dans leurs divergences d’avec lui-même, arrivera à » redresser ses propres jugements inexacts ou à obtenir que les autres modifient les leurs ».
Considérez cependant la somme d’efforts sur soi-même que requiert une telle attitude. Combien d’impulsions passionnelles à juguler avant de réussir à se substituer soi-même à son propre contradicteur, pour arriver à situer le point d’équilibre à partir duquel la barrière du désaccord pourra être abattue.
Imaginez encore la profondeur et l’étendue de cette dévotion à la tolérance. La profondeur, car elle doit s’exercer même et surtout à l’égard de ceux dont la pensée est le plus radicalement opposée à la nôtre; l’étendue, car elle implique un appétit de contacts sensibles aux fins de mutuelle compréhension entre hommes de conditions diverses, qu’ils soient d’un même pays ou de nations différentes.
La tolérance, a-t-on dit à juste titre, est donc, à la compréhension humaine, ce que la méthode est à la compréhension des sciences. Aussi cette compréhension vers une active fraternité porte-t-elle en elle-même sa récompense.
Elle brise les chaînes des mythes et des scolastiques, ces servitudes spirituelles qui étouffent l’esprit critique et déchirent les hommes, tiraillés par des haines absurdes et des désespoirs avilissants.
Elle relève l’homme à ses propres yeux, pour le rendre digne de sa mission sur la terre par la pratique éclairée de ce don incomparable et suprême qu’est sa liberté de « jugement », fruit merveilleux du jardin de la connaissance. Elle offre à tous l’occasion de s’unir en égalité dans un idéal commun de paix et de concorde.
La Tolérance est bien un universalisme selon l’Esprit.
Universalisme
Si l’humanisme caractérise la manière de penser et de sentir de ceux qui, au XVI° siècle, surent, quoi qu’il advint et malgré les guerres religieuses, aimer les hommes et ne jamais désespérer de l’humanité, on peut dire que l’universalisme est une forme d’humanisme étendu.
Est universaliste qui sait accueillir sans haine, sans passion, sans préjugé, toute manifestation de l’esprit humain, de l’âme humaine, tout ce qui procède d’un cerveau ou d’un cœur humain, d’où que vienne cette manifestation à travers le temps ou l’espace…
C’est pourquoi, dès lors qu’une manifestation de l’âme ou de l’esprit humain se présente au seuil du Temple maçonnique, au cœur ou à la pensée d’un Franc-Maçon, cet universalisme oblige le Temple et le Maçon à écouter et à entendre avant de refuser ou d’accepter.
Solidarité
La Franc-Maçonnerie exprime en termes modernes des valeurs morales magnifiquement vivantes malgré leur très antique passé, et d’autant plus efficaces et solides qu’elles ont pus résister à l’épreuve du temps.
pérennité de sa race que procèdent tous ses droits et tous ses devoirs.
La nature établit dans la famille humaine, comme base de droit nécessaire, une autorité patriarcale continue, spécifiquement fondée sur la force, la connaissance, la conscience et l’amour, qu’exercent momentanément et successivement les individus physiquement et spirituellement les plus aptes à assurer le respect de ces buts permanents.
Chacun de ceux appelés à l’exercice de cette autorité a charge de protéger, d’instruire, de discipliner et, quand les temps sont venus, d’émanciper, puis, la tâche accomplie, d’abdiquer en faveur du successeur qualifié. Expérience, connaissance, action et amour, en vue de l’avenir de l’espèce et par sa progressive émancipation, tels sont les principes d’un ordre harmonieux et sans artifice.
Un tel ordre s’étend de manière analogue aux esprits qui ont aussi leurs hérédités et leurs familles.
La fraternité n’est pas, on le sait, limitée ou réservée à la consanguinité; elle procède davantage d’une solidarité spirituelle.
Un tel ordre encore s’impose, pour sa pérennité, à toute œuvre matérielle ou spirituelle; toute construction durable doit s’ériger selon la loi, par l’accord nécessaire des nombres, dans la conjonction de l’harmonie intérieure avec l’universelle harmonie, afin que ce qui est en bas soit analogue à ce qui est en haut.
Cherchant patriarcalement, parmi des adeptes, des Maîtres d’œuvres libres de pensée autant que fervents de libre discipline, sachant mûrir le plan dans la règle et avec sagesse, pour n’agir ensuite qu’en conscience, amour et vérité, la Franc-Maçonnerie est une société initiatique, une famille, dont les rites et l’histoire conduisent ses membres, par des moyens séculaires, au développement progressif de leurs plus hautes virtualités spirituelles, afin qu’ils servent à l’humanité, dans son incessante évolution, de guides fraternels vers le perfectionnement, l’ordre et l’harmonie.
En accomplissant sur eux-mêmes et en eux-mêmes, pour être dignes de leur mission, un travail persévérant dont la Loge leur fournit le cadre à chaque étape, les Francs-Maçons se donnent à eux-mêmes la récompense de leur propre élévation dans l’amour et la connaissance.
Leur Ordre ne leur impose rien d’autre que d’être libres et hommes de bien, tolérants et respectueux des lois de la patrie et, par-dessus tout, de celles qui régissent l’admirable architecture universelle.
Son Ésotérisme
Cohéritière avec ses sœurs, les Grandes Loges établies dans les autres pays du monde, de cette Tradition, la Grande Loge de France postule donc l’existence d’un principe créateur, dynamique par excellence et organisateur des mondes, qu’avec elles elle nomme le » Grand Architecte de l’Univers » et qu’elle symbolise par le ternaire, car, triple nécessité de toute existence, toute conception appelle un support pour aboutir à sa manifestation dans l’équilibre et l’harmonie.
Mais elle n’impose aucun dogme, laissant à chacun de ses adeptes le soin d’interpréter, à son usage personnel et selon ses propres lumières, l’enseignement muet des symboles qui s’offrent à son entendement par le rationnel et le sensible. Elle ne s’inscrit à l’encontre d’aucune doctrine philosophique ou religieuse, d’aucune race, d’aucune croyance pour autant qu’elles ne soient pas négatrices de l’ordre universel, de la Vie ou de la dignité de la personne humaine.
Elle est ainsi fidèle à sa tradition qui lui commande de ne mettre aucune limite à la recherche de la vérité et de tenir la liberté, ce « patrimoine » de l’humanité tout entière ce » rayon d’en haut » qu’aucun pouvoir n’a le droit d’éteindre ni d’amortir pour le bien le plus précieux qui ait jamais été donné à l’homme pour le rendre digne de la vie.
Cette dignité, le Franc-Maçon la consolide par le travail, et d’abord par ce travail sur lui-même qui le conduira par les voies du bon sens, puis de la culture intellectuelle et rationnelle, vers une ascension intérieure et spirituelle, seule capable de le situer harmonieusement dans l’Univers vivant.
La Loi du Silence
Toute Loge maçonnique, étant un temple de Lumière, est traditionnellement appelée Loge de Saint-Jean (Jean du solstice d’hiver, Jean du solstice d’été) Jean, dont le nom rayonne de l’éclat dispensé par la source même de toute vie ici-bas.
Ne vous méprenez pas, cependant. Si grande que soit l’antique gloire de notre Ordre, nous ne sommes point infatués de nous-mêmes, tous nos efforts se poursuivent dans la modestie.
La primauté que nous donnons à l’esprit et qui nous pénètre d’espérance et d’optimisme, loin de nous en faire départir, nous y maintient immanquablement leurs tâches.
1997 Grande Loge de France (tous droits réservés)